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Roland Garros, vainqueur de la Méditerranée 
en 1913 et sociétaire du Stade Français. 
(12) 1928 : 
le grand chelem des Mousquetaires


Épisode précédent : 7-9 septembre 1927 France bat États-Unis 3/2.

Épisode suivant : 1928, 1932 la France défend de la coupe Davis

En 1928, tous les ingrédients sont enfin en place pour donner une consistance à la notion de grand chelem, même si l’idée va encore mettre quelques années pour se concrétiser. 
1928, c’est d’abord l’année de la construction du stade Roland-Garros, contruction rendue nécessaire depuis la victoire de l’équipe de France. Paris se doit de disposer d’un stade dédié au tennis comparable à ce qui existe à Wimbledon. Les installations du Stade Français et du Racing étant limitées, il apparaît vite indispensable à la Fédération Française de se doter d’une infrastructure digne de la coupe Davis et surtout de ses défenseurs. L’hiver est donc occupé par l’achat d’un terrain près de la porte d’Auteuil et la construction d’un nouveau stade de 13.000 places, qui sera géré conjointement par le Stade Français et le Racing. Ce nouveau temple du tennis ne porte pas le nom d’un sportif, mais d’un aviateur, Roland Garros. En effet, Émile Lesueur, président du stade Français, entend honorer ainsi le souvenir de son ancien camarade d'HEC, grand sportif et sociétaire de son club, mort au combat en 1918:   

Hiver 1928 : les débuts de la construction 
du stade Roland-Garros
Ensuite, par un effet de balancier bien naturel, l’arrivée de la coupe Davis en Europe va provoquer un retour en force des joueurs Australiens et Américains aux internationaux de France qui deviennent ainsi un tournoi de préparation idéal avant les finales interzones et le challenge Round. Car la coupe Davis reste l’épreuve la plus prestigieuse, le trophée le plus convoité et la véritable motivation des fédérations pour envoyer leurs meilleurs joueurs dans de lointains pays…
Première levée :

Les Australiens, justement, préparent leur grand retour sur la scène internationale après deux ans d’absence. La Fédération Australienne commence donc par inviter l’équipe de France, toute auréolée de la gloire de sa récente victoire en coupe Davis. La Fédération Française se fait une joie d’accepter: Borotra, Brugnon et le jeune espoir Christian Boussus, partent donc en cette fin d’année 1927 pour les antipodes. Le seul moyen de transport est le bateau, et la tournée dure sept mois (dont plus de deux mois de voyage!), en passant par l'Amérique du Sud, l'Australie, la Nouvelle Zélande et l'Afrique du Sud. Cette tournée est un grand succès pour l’équipe de France. Borotra s’y distingue tout particulièrement en remportant les trois épreuves des championnats australiens : simple, double avec Brugnon, et mixte avec l’excellente australienne D.Akhurst qui elle aussi fait le triplé. Borotra bat en cinq sets l'autralien Cumming et succède au palmarès à Hawkes (1926) et Patterson (1927). 

 

Brugnon et Bototra : au cours du premier Roland-Garros, les anciens s'imposent face aux équipes qui devaient constituer l'avenir du tennis français : Lacoste-Boussus et Cochet-De Buzelet.

Lacoste vainqueur sert la main de Cochet à Wimbledon. 
C'est la revanche de Roland-Garros.
  Deuxième levée:

Tout est prêt la première quinzaine de juin pour le premier Roland-Garros de l’histoire. Le public a enfin un stade digne de ses nouveaux héros qui remportent tant de victoires sur tous les courts du monde. Malheureusement, Tilden n’est pas là, et c’est une grosse déception. Mais c’est le grand retour des Australiens à Paris : Lacoste rencontre sur son chemin un jeune homme timide et plein d’avenir du nom de Jack Crawford, et Hawkes réussit à se glisser jusqu’en demi-finale après avoir battu Brugnon au tour précédent. Il y est en bonne compagnie avec les inévitables Borotra, Cochet et Lacoste. C’est finalement Henri Cochet qui remporte son premier titre à Roland-Garros en battant Lacoste en quatre sets au cours d’une magnifique finale. Jamais "Le magicien" n'avait autant mérité son surnom que ce jour-là. L'équipe Borotra-Brugnon complète le succès français en double messieurs.
 

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Troisième levée:

Wimbledon 1928 ne semble pas pouvoir échapper à un français et leur seul rival est encore Tilden, pourtant âgé de 35 ans. Ils sont trois à pouvoir prétendre au titre : Borotra a participé aux quatre dernières finales dont deux victoires, Cochet est le tenant du titre et Lacoste a gagné en 1925. Fait unique dans l'histoire de Wimbledon, il y a même sept français en huitième de finale et encore cinq en quart de finale. La surprise est créée par Christian Boussus, 20 ans, qui atteint la demi-finale en battant un Brugnon en petite forme avant de se faire battre par Cochet. Dans l'autre demi-finale, Lacoste réussit à se débarrasser de Tilden après un match très dur en cinq sets. En finale, Lacoste prend sa revanche sur Cochet en quatre sets. Cochet-Brugnon remportent également le double aux dépens des australiens Hawkes et du vétéran Patterson.

Quatrième levée:

Après la rencontre victorieuse en coupe Davis, pour laquelle Tilden, accusé un temps de professionnalisme, a été miraculeusement requalifié "amateur" au dernier moment, l'équipe de France emmenée par Cochet mais sans Lacoste fatigué, fait le traditionnel voyage en Amérique pour participer aux championnats d'Amérique. C'est la première fois dans l'histoire du tennis qu'un joueur est en position de remporter un grand chelem : Brugnon, déjà vainqueur en Australie et à Paris avec Borotra, et à Wimbledon avec Cochet, est en effet en mesure de faire la passe de quatre. A peine débarqués, les français participent donc aux championnats de double à Boston, excellent entraînement avant le simple début septembre. Cochet et Brugnon affrontent en demi-finale les américains Lott et Doeg, une paire largement à leur portée. Mais un Cochet inconstant fait durer le match jusqu'à 4 partout au cinquième set, lorsqu'un orage éclate. Le lendemain, les deux équipes décident d'un commun accord de recommencer le match. Hélas, les français fatigués ne font que 6 jeux en tout ! Voilà comment on rate un grand chelem !

Pour le simple messieurs, c'est plus simple. Cochet espérait sans doute rencontrer Tilden et confirmer ainsi sa place de N°1 mondial ? Son espoir est déçu. Tilden battu en coupe Davis est de nouveau attaqué à son retour pour professionnalisme et suspendu. A croire que chaque défaite en coupe Davis coûte à Big Bill une suspension ! C’est donc sans grande émotion que Cochet devient champion d’Amérique en battant Hunter en finale au cours d’une partie qui va quand même durer jusqu’au cinquième set. Et de quatre pour les Mousquetaires !

 

 
Frank Hunter, conseillé par son partenaire 
de double, pour une fois en costume... 
Tilden n'a que le droit d'être spectateur...

Les Mousquetaires:
Brugnon, Cochet, 
Lacoste et Borotra.
Conclusion:

Finalement, nous y sommes. Wimbledon n’est plus tout à fait le plus grand tournoi du monde. Roland-Garros et Forest-Hills commencent à exciter les convoitises des meilleurs joueurs de la planète. Pour ne pas être en reste, la fédération australienne va de plus en plus souvent inviter les meilleurs joueurs étrangers et recommence à envoyer régulièrement de fortes délégations en Europe et en Amérique. De plus, pour s’épargner des déplacements inutiles, l’équipe d’Australie s’inscrit dans la zone européenne pour la coupe Davis. C’est ainsi que dans les années trente, le parcours type de l’équipe australienne débute par un séjour en Europe au printemps avec Roland-Garros, Wimbledon et les éliminatoires de la coupe Davis, et retour par l’Amérique pour disputer Forest-Hills début septembre, avant de retrouver chez eux le printemps des antipodes. 

Dans ces conditions, il n’est pas vraiment étonnant que le premier joueur à avoir tenté le grand chelem - sans le vouloir, et à l’avoir presque réussi... - ait été un Australien. Ce sera Jack Crawford en 1933.

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Dernière mise à jour : 2 Octobre 2000
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Mars 2000.